Romain
Tout a commencé une dizaine de jours après mon 19ᵉ anniversaire, vers le 1ᵉʳ novembre 2023. Quelques douleurs apparaissent comme un torticolis, cela ne me dérange pas plus et ne prête pas une réelle attention. Il faudra une dizaine de jours en plus pour avoir une première crise de douleur, seulement quelques jours avant ma première compétition depuis ma déchirure du psoas le 28 mai 2023. Un passage aux urgences est nécessaire. Suite à ce passage au cours duquel des antidouleurs me sont donnés et une nuit assez difficile malgré la fatigue, je fais mon premier examen, un scanner.
Nous sommes début novembre, et le résultat montre une inflammation entre la vertèbre C5 et C6 et indique de faire une IRM afin d’avoir des éclaircissements sur cette inflammation.
Je décide donc de suivre la préconisation du spécialiste et programme une IRM qui lancera le début de quelques chose de nouveau pour moi.
J’ai passé des jours difficiles, beaucoup de fatigue et très souvent des lancements comme des coups de foudre dans la colonne vertébrale, m’empêchant de bouger ou de contrôler mon corps.
Le vendredi 24 novembre 2023, il est 15 h et je sors des cours universitaires, il fait beau temps, je me sens bien malgré mes douleurs habituelles. Lors de l’IRM, tout ne se passe pas comme prévu, un coup de froid me traverse des pieds, passe par la colonne vertébrale et remonte jusqu’à ma tête. Je suis seul. J’ai froid. Je tremble. J’ai mal. Je pleure. Les images sont un peu floues, mais restent exploitables, je sors de la machine en étant complètement déphasé.
Les médecins regardent très rapidement les images et constatent une masse dans mon cou qui comprime ma moelle épinière et décident de m’aliter sans que je puisse me relever au-dessus de 30 % du plan horizontal. Je suis donc hospitalisé vers 18 h aux urgences de mon hôpital.
Je passe la nuit, puis le week-end et l’on me fait des séries de tests, prises de sang, hémoculture, électrocardiogramme…
Les médecins contactent en premier lieu des neurochirurgiens qui me redirigent finalement vers un second lieu, un institut à Villejuif qui pourrait être plus apte pour savoir ce que j’ai.
Alors le mardi 28 novembre, je suis transféré vers cette immense tour de plus de 15 étages. C’est d’ailleurs là que je peux faire ma 1ʳᵉ douche dans un lit-bain. Accueilli et bien servi, on me prépare à aller faire un examen en plus, une biopsie. Je ne sais pas ce que c’est et suis plutôt assez ignorant à ce sujet, je ne pose pas de question, j’y vais.
La suite s’accélère, on est mercredi soir, les médecins viennent dans ma chambre et m’annoncent que je suis atteint d’un cancer. Le lendemain, ils reviennent et me précisent que je suis atteint du sarcome d’Ewing sur le processus épineux de la vertèbre cervicale 5. Il faut agir rapidement et savent exactement ce qu’il faut faire : on contient la tumeur avec des médicaments par voie orale pour éviter que ça n’empire, on agit le plus vite possible et j’attaque le jeudi 30 novembre ma 1ʳᵉ chimiothérapie.
Pour être honnête, je n’ai pas la moindre peur, pas le moindre stress, je suis même ignorant de ce que j’ai. Je reste quelques jours supplémentaires en surveillance dans le service de pédiatrie. Le temps pour les médicaments de me donner des sautes d’humeur immenses, : je suis heureux, je pleure, j’ai envie de courir, je suis fatigué, j’ai faim, mais rien ne me donne d’appétit et petit à petit, je comprend ce que je vis…
J’AI UN CANCER.
C’est dur à 19 ans de se dire ça, pour moi cela a toujours été la maladie des vieux par excellence, malheureusement, je suis dans un environnement dans lequel tous mes voisins ont plus ou moins 2, 5, 10, 20 ans. Personne n’est âgé, je suis même l’un des plus vieux.
Allez Romain, remobilise-toi ! Tu ne vas pas changer pour ça, ta famille, tes amis, ta copine, tes proches sont apeurés, mais toi, tu es un GUERRIER, tu es LA MACHINE, tu es l’INVINCIBLE, tu es aussi tout simplement toi.
De là est venue, petit à petit, ma façon de faire, de penser, : essayer de minimiser un maximum la chose, à chaque cure passée, il ne t’en reste QUE x cure à faire, ton corps à une maladie, mais Romain N’EST PAS malade.
J’avance et les jours passent, les trois premières cures se font, le protocole avance et les examens reviennent. On est le 2 janvier 2024, la nouvelle année s’est fêtée et on retourne à l’hôpital pour faire un premier point à un mois de traitement. La tumeur est divisée par 7 ! Quelle bonne nouvelle !!!! La chimiothérapie que je suis fonctionne à merveille !!!! On ne bouge pas le protocole et on continue d’avancer. Tellement que je reprends une très légère activité sportive, à l’aide d’une petite balle en plastique et d’un vélo d’appartement… Ce n’est pas un luxe, mais c’est déjà mieux que rien et je m’évade à pouvoir faire ces activités.
Le temps passe, les cures sont rythmées par des vomissements, de la fatigue, des infirmières et des médecins à perte de vue qui vont et viennent dans ma chambre d’hôpital. Vient au bout 4 mois de traitement intensif des examens de contrôle, évidemment je me dis que ma tumeur devrait être plus petite qu’avant mais que sa taille serait un peu similaire à celle du 2 janvier…
Ce 26 mars 2024, les résultats montrent qu’elle a diminué par 13 par rapport à janvier et par quasiment 100 par rapport au tout début du traitement ! Ce fut une nouvelle qui m’a redonné de l’énergie, de la force, du courage pour continuer à me battre, pour moi, mais aussi pour ma famille, mes amis, mes proches.
Ces images furent une base de départ pour le traitement que j’allais suivre pour les 6 semaines qui allaient se dérouler ; 30 séances de protonthérapie. C’est une sorte de radiothérapie classique, mais on y remplace les rayons X par des protons.
La protonthérapie se déroulait en même temps que mes chimiothérapies, qui avaient temporairement été réduites pour baisser la toxicité du traitement.
Cependant, j’ai eu des effets secondaires qui sont apparus très rapidement. En premier lieu une irritation de la gorge qui ne faisait qu’empirer au cours du temps. En deuxième lieu un énorme coup de soleil (brûlures) à l’arrière du cou ce qui m’empêchait de m’exposer au soleil sans la moindre protection. Mais parmi ces effets secondaires, il y en a un qui était sympa : la repousse d’un duvet sur tout mon corps. En effet, la chimiothérapie m’a fait perdre tous mes poils (oui tous sans exception) et la protonthérapie m’a permis de retrouver une légère pilosité, surtout liée à la baisse des doses de chimiothérapie à mon avis.
Fin mai, un rendez-vous de fin de protonthérapie s’est déroulé et là fût la première bonne nouvelle quasi officielle : ma tumeur a disparu !
Mais ne soyons pas trop fier trop tôt, il me reste encore quatre cures de chimiothérapie à faire et ce sont les plus dures !
En effet, quelques complications d’infection du Pac, fièvre, aplasie fébrile, perte de connaissances sont apparu sur ces deux derniers mois… J’ai été très bas physiquement, biologiquement, je ne tenais à rien du tout, mais mentalement, j’étais un GUERRIER INVINCIBLE, INSURMONTABLE.
Ma dernière cure de chimiothérapie s’est donc déroulée du 1ᵉʳ au 5 juillet 2024. Elle s’est clôturée en beauté avec la Diamond League de Paris où j’ai pu assister à un spectacle grandiose, deux records du monde et trois records de France !!!
Ce vendredi 12 juillet, avec l’aide d’imagerie réalisée mercredi 10 juillet, j’ai eu mon tout dernier rendez-vous avec mon oncologue pour ce qui est du traitement.
Le verdict final est tombé…
JE SUIS VICTORIEUX !!!!!!!!!!! J’AI VAINCU LE CANCER !!!!!!!!!!!
Je n’ai JAMAIS baissé les bras, malgré des coups de mou à certains moments. J’ai TOUJOURS gardé l’envie de me battre, et de vaincre.
Tout n’est malheureusement pas fini. Car oui, lorsqu’on a une maladie de ce genre, il y a un suivi à faire avec des examens à réaliser régulièrement, d’abord tous les trois mois, puis tous les six mois si les résultats sont bons. Et ce pendant plusieurs années, afin d’éviter la moindre récidive.
Je vais citer des prénoms des personnes qui m’aidaient quotidiennement, des personnes qui méritent tous les remerciements du monde pour m’avoir aidé à garder le cap : Thierry, Virginie, Thomas, Alexis, Amélie, Pascaline, Romain, Pierre, Noa, Phylie, Philippe, Jean-Jacques, Fabrice, Malika, Matthieu et vous tous qui m’avez soutenu d’un message ou plusieurs, vous étiez près de 250 au total.
C’est fièrement que je continue d’avancer dans mes projets de vie, dans mes projets perso et dans mes projets sportifs. J’irai là où ma place doit être.
Cœur sur vous tous, on se reverra bientôt